El artículo siguiente se publicó en 2010, en un volumen de la Société P-J Proudhon publicado bajo nuestra dirección (Le fédéralisme: le retour ?, Paris, Publications Sté P.-J. Proudhon, 2010, pp. 23-39). En este texto reflexionamos sobre el lugar de la secesión en la teoría del federalismo, cuestión muy poco tratada en los estudios federales, y de la que, entendíamos entonces y seguimos entendiendo, no puede desinteresarse la teoría del federalismo, ni de manera más general la teoría política.
Quelle place
pour la sécession dans la théorie du fédéralisme ?
Malgré le récent regain d’intérêt que
la question de la sécession a pu susciter entre les chercheurs (notamment de
langue anglaise), elle reste l’un des grands oubliés ou impensés de la science
et de la philosophie politiques. Cela peut s’expliquer de plusieurs manières. D’une
part, il faut noter que jusqu’aux années 1980-1990 les spécialistes du
fédéralisme ont suivi pour l’essentiel la doctrine classique en droit public, selon
laquelle l’Etat fédéral serait une forme spéciale d’organisation politique que
pourrait adopter un peuple ou une nation dont l’intégrité territoriale et
l’identité particulière ne feraient pas discussion. C’est le cas par exemple des
Etats-Unis, de l’Allemagne ou de l’Australie, Etats fédéraux que l’on peut qualifier
d’Etats-nation ou d’Etats consolidés, au sens voulu par J. Stuart Mill (un
Etat, une nation)[i].
Dans tous ces Etats, le peuple ou nation étant déjà autodéterminé, il y aurait
comme une incohérence à poser la question de la sécession à l’intérieur de
leurs frontières : qui ferait alors sécession ? Ce non-sens auquel
nous renvoient aussi bien la doctrine dominante que le droit positif fédéral
s’est généralement traduit, dans les sciences politiques et juridiques, par
l’abandon de cette importante question.
Mais si, historiquement, le fédéralisme,
dans sa pratique comme dans sa théorie, a pu s’éloigner de certains de ses
principes fondateurs[ii],
il convient aussi de rappeler, d’autre part, que même dans les théories
fédérales qui prennent appui sur le principe contractualiste - la fédération
non pas comme un seul peuple ou nation, mais comme résultante d’un contrat
passé entre plusieurs peuples ou nations -, il y a comme un malaise à envisager
le droit de sécession que pourrait avoir l’une des parties fédérées par rapport
au tout fédéral. Nous avons un bel exemple de cette tendance chez Bernard
Voyenne, auteur qui fut de son vivant l’un des meilleurs connaisseurs de la
pensée et du fédéralisme proudhoniens. Voyenne faisait partie de ceux qui, à
l’instar de Proudhon, pensaient le fédéralisme à la lumière du pacte ou
contrat ; mais, à la différence de Proudhon, il ne semblait pas très à
l’aise avec la sécession. Je me permets de renvoyer le lecteur au chapitre que
Voyenne consacre au fédéralisme des juristes dans son important ouvrage L’histoire de l’idée fédéraliste[iii],
où il traite cette question d’une manière très maladroite, son malaise le
conduisant finalement à se mettre en contradiction[iv]
avec la théorie fédérale qu’il défend dans son travail. En effet, Voyenne
s’attarde longuement sur le fameux dilemme « Calhoun », qui porte
comme l’on sait sur le titulaire de la souveraineté dans la fédération :
« Ou
bien les traités qui ont donné naissance à l’Etat subsistent, et alors cet Etat
n’existe qu’en vertu de la souveraineté de ses membres ; ou il s’agit,
comme le prétendent les fédéralistes (sic), d’un pacte définitif et dans ce cas
on se trouverait en face d’un Etat unitaire »[v].
Disons tout de suite que les arguments
utilisés par les spécialistes du fédéralisme pour refuser le droit de sécession aux parties fédérées ne
manquent pas. Quand les auteurs s’opposent à la sécession en mettant en
évidence par exemple l’instabilité que le droit de sécession pourrait
introduire dans une fédération, livrée dès lors aux sautes d’humeur des parties
fédérées, ou bien lorsqu’ils montrent que la sécession pourrait être contestée
légitimement par la fédération en raison, par exemple, des investissements que
la fédération aurait pu faire dans le territoire sécessionniste - avantage ou
bénéfice que celui-ci aurait obtenu grâce à l’effort collectif, et pour lequel
la fédération serait donc en droit de demander un dédommagement en cas de
sécession -, on voit tout de suite le poids et la pertinence des arguments. En
effet, la stabilité politique est en démocratie indiscutablement un bien vers
lequel tend toute société bien ordonnée, tout comme la justice et la solidarité
interterritoriales, valeurs, toutes, qui seraient peut-être mises à mal si on
laissait un droit de sortie arbitraire aux parties fédérées. Ce sont des
arguments importants qui méritent d’être pris en considération, et qui
apportent en tout cas de l’eau au moulin de ceux qui pensent que la sécession
ne peut intervenir que lorsqu’il y a juste
cause, mais en aucun cas dans une fédération ou dans un Etat démocratique
accordant une certaine autonomie à ses collectivités territoriales[xi].
Cela étant, même si on peut apprécier la
pertinence de certains des arguments avancés pour refuser le droit de sécession
aux parties dans une fédération, il n’en reste pas moins qu’aucun de ces
arguments ne parvient à expliquer de manière raisonnable et convaincante (surtout aux yeux de ceux qui estiment avoir
droit à un tel droit) comment et pourquoi les parties d’une structure fédérative
pourraient souhaiter fermer la porte de sortie derrière eux en entrant
librement dans une fédération[xii],
ni même d’ailleurs pourquoi il faudrait refuser catégoriquement un droit de
sécession à un territoire autonome (partie d’une fédération ou non) qui
respecte les principes de la démocratie libérale et manifeste clairement et
majoritairement sa volonté de constituer un Etat séparé (l’Ecosse ou la
Catalogne, par exemple). De toute évidence (les arguments précités le
montrent), la question de la sécession appelle des réponses beaucoup plus
nuancées qu’une réponse, affirmative ou négative, catégorique et
inconditionnelle.
Dans cet article, j’argumenterai en
faveur de la nécessité d’une théorie de la sécession pour la théorie normative
du fédéralisme. Si le fédéralisme est une union de peuples souhaitant mettre en
commun un certain nombre de choses tout en se réservant, de manière privative,
la gestion d’un certain nombre d’autres choses (notamment celles qui touchent à
l’identité et à la culture de chaque peuple), la théorie du fédéralisme ne peut
raisonnablement faire l’impasse sur la question de la sécession. Ce serait en
quelque sorte comme signer un contrat dans lequel il n’y aurait pas de clause
de résiliation. J’expliquerai très brièvement, dans un premier temps, pourquoi
le contractualisme fédéral exige que l’on prenne au sérieux la question de la
sécession, et pourquoi elle est importante. Dans un deuxième temps, je discute
la théorie qui consiste à présenter la sécession comme étant un principe
contraire aux valeurs du fédéralisme[xiii]
en essayant simplement d’avancer quelques arguments nous permettant de
comprendre qu’une lecture positive de la sécession est possible, et qu’elle est
parfaitement en accord avec les valeurs du fédéralisme et de la démocratie.
1. Le
contrat fédératif est bien un contrat
Le contrat fédératif est bien un
contrat, un contrat de droit public (compact),
mais un contrat tout de même[xiv].
Proudhon exprime déjà cette idée dans Du Principe
fédératif, en insistant sur les deux piliers de sa théorie
fédérative : 1) les sujets du pacte fédératif sont des sujets collectifs,
(peuples ou territoires) et non des individus (différence avec le contrat
rousseauiste) ; 2) le lien fédératif qui les unit (le droit créé par les
parties) est bien un lien contractuel (leur volonté) et non un lien statutaire
ou organique[xv].
Proudhon explique les raisons de ce qu’il présente comme étant la logique
fédérale de la manière suivante :
«
Le contrat de fédération […] est essentiellement restreint. L’Autorité chargée
de son exécution ne peut jamais l’emporter sur ses constituantes, je veux dire
que les attributions fédérales ne peuvent jamais excéder en nombre et en
réalité celles des autorités communales ou provinciales, de même que celles-ci
ne peuvent excéder les droits et prérogatives de l’homme et du citoyen. S’il en
était autrement, la commune serait une communauté ; la centralisation
redeviendrait une centralisation monarchique ; l’autorité fédérale, de
simple mandataire et fonction subordonnée qu’elle doit être, serait regardée
comme prépondérante ; au lieu d’être limitée à un service spécial, elle
tendrait à embrasser toute activité et toute initiative ; les Etats confédérés
seraient convertis en préfectures, intendances, succursales ou régies. […] La
même chose aurait lieu, à plus forte raison, si, par une fausse raison
d’économie, par déférence ou par toute autre cause, les communes, cantons ou
Etats confédérés chargeaient l’un d’entre eux de l’administration et du
gouvernement des autres. La république de fédérative deviendrait
unitaire »[xvi].
Mais, bien logiquement, à partir du
moment où le contrat fédératif devient organique et unitaire (un seul peuple ou
nation pour la fédération), il ne peut plus être question pour les parties
fédérées de revendiquer un quelconque droit d’initiative souveraine en vertu
duquel elles pourraient quitter la fédération, car ce droit, nous dit-on, elles
l’auraient tout simplement perdu en chemin. On ne sait plus très bien comment
ni pourquoi, mais les parties fédérées auraient renoncé à ce droit[xviii].
Or c’est bien la perte de ce droit de sortie (beaucoup plus que la perte de
certaines compétences, par exemple) qui pose problème dans un certain nombre
d’Etats dans lesquels cohabitent plus d’une nation et plus d’un nationalisme
(Canada, Belgique, Espagne, etc.), tout comme pose problème, c’est surtout cela
qui nous intéresse ici, le fait que la théorie classique du fédéralisme ne
parvienne pas à rendre compte, avec un minimum d’impartialité, de cet épineux
dossier. Cela expliquerait aussi son incapacité à trouver des solutions aux
problèmes qui se posent.
Cette manière de voir et de comprendre
le lien fédératif comme un lien statutaire et indisponible pour les parties
fédérées (la nation fédérale vue comme appartenant au groupe national
majoritaire) est tellement différente du fédéralisme contractuel (compact), qu’on doit se demander si dans
ce cas on se trouve encore devant une structure fédérative ou bien s’il ne
s’agirait pas d’autre chose, d’un Etat unitaire par exemple. C’est en tout cas
la thèse d’Olivier Beaud lorsqu’il distingue Etat (unitaire ou fédéral) et
Fédération, en montrant que toute structure politique qui opte pour la
souveraineté verticale et pour l’omnicompétence de l’Etat rompt d’une certaine
manière ses liens avec la logique et les valeurs premières du fédéralisme (son
double telos, la fin particulariste
et la fin commune) :
« Le telos de la Fédération se caractérise
par cet équilibre qu’il faut maintenir entre les deux fins contradictoires que
sont la fin commune et la fin particulariste. Il n’y a donc de Fédération
[fédéralisme : JC] que si cet équilibre fédératif est réellement
l’objectif des fondateurs, que si cette tension existentielle est reflétée dans
le dessein institutionnel et dans l’attitude des gouvernants »[xix].
Dès lors que le contrat fédératif, si
nous revenons à la notion de contrat, est un vrai contrat politique (compact) validé entre peuples qui
décident librement de gérer en commun un certain nombre de choses tout en se
réservant exclusivement un certain nombre d’autres choses, il est difficile
d’expliquer que la volonté initiale d’entrer dans la fédération ne soit pas
corrélée d’une éventuelle volonté de sortir autrement que par une logique
verticale et centralisatrice (celle du groupe national majoritaire qui impose sa nation aux minorités nationales), volonté
qui serait en l’espèce contraire au pacte[xx].
Si les parties du contrat entrent dans le contrat librement et conditionnellement,
elles doivent aussi pouvoir le quitter librement et conditionnellement[xxi].
Vu sous cet angle, on pourrait même
pousser la réflexion plus loin et dire que toute structure fédérative qui ne
prévoit pas de droit de sécession dans sa Constitution peut reconnaître
implicitement ce droit dès lors que le principe fédératif est assumé comme
principe fondamental de son organisation politique. Comme l’a très bien
expliqué la Cour Suprême du Canada dans son renvoi de 1998 sur une éventuelle
sécession unilatérale du Québec, la disponibilité du pacte est un principe non
écrit du fédéralisme qui peut être invoqué sous certaines conditions, comme les
principes généraux du droit, même à défaut d’être mentionné par la Constitution[xxii]
ou développé ultérieurement par le législateur[xxiii].
2.
Le
fédéralisme doit-il craindre la sécession ?
Nous avons parlé
jusque-là de fédéralisme, et d’un type de fédéralisme en particulier : le
fédéralisme contractualiste. Si nous quittons le terrain des principes et des
valeurs premières du fédéralisme, sur lesquels doit nécessairement prendre
appui toute théorie normative du fédéralisme, et passons à celui de la pratique
(du droit positif), force est de constater que la plupart des structures
fédératives aujourd’hui sont, en tout ou partie, contraires au principe
contractualiste. Des Etats-Unis à l’Australie, en passant par le Brésil ou
l’Allemagne (demain, qui sait ?, l’UE), dans bon nombre d’Etats fédéraux
le système prend appui sur l’idée de l’existence d’un seul peuple et sur une
base plutôt individualiste qu’holiste[xxiv]
de la fédération et de son pacte fondateur. Cela étant, même si dans toutes ces
structures fédératives ou décentralisées le droit de sécession est formellement
interdit[xxv],
ce qui peut se comprendre, comme il a été dit plus haut, quand on conçoit la
fédération comme un seul peuple, il n’en reste pas moins que les questions
posées par la sécession, en tant que droit qu’un peuple entend être implicite à
sa condition de peuple, n’ont pas reçu de réponses satisfaisantes dans les
théories libérales de la justice ou de la démocratie. En effet, que se
passe-t-il lorsque, en démocratie, une partie de l’Etat décide par des moyens
démocratiques qu’il est grand temps de le quitter et de créer un Etat indépendant
? Cette question se pose aujourd’hui dans des Etats qui, comme l’Espagne, ne
sont pas à proprement parler un Etat fédéral (ne reconnaissent pas le
fédéralisme comme l’un de leurs principes fondateurs et fondamentaux) ; et
la question s’y pose à vrai dire avec autant de force et sans doute pas moins
de légitimité que dans des Etats fédéraux, comme la Belgique ou le Canada. Ce
que je veux dire par là c’est que les commentaires précités, et ceux qui vont
suivre, n’intéressent pas seulement une théorie fédérative contractualiste,
mais plus largement toute forme étatique ou théorie démocratique de l’Etat
susceptible de connaître une certaine forme de pluralisme culturel ou national
pouvant déboucher sur des demandes de sécession. Car si la sécession peut être
entendue comme étant de droit dès lors que le principe fédératif est assumé
constitutionnellement, la question se pose aussi légitimement dès lors que le
principe démocratique l’est aussi[xxvi].
La sécession du Québec, si le peuple québécois le veut ainsi, serait-elle plus
légitime et conforme aux principes ou aux valeurs de la démocratie que celle de
la Catalogne, si les Catalans le souhaitent, au seul prétexte que le Canada est
un Etat qui reconnaît le fédéralisme parmi ses principes fondateurs et
l’Espagne non ? Répondre par l’affirmative reviendrait à vider
partiellement de son sens le principe de base de la démocratie, selon lequel
c’est finalement le peuple qui choisit[xxvii].
Cette remarque
étant faite, j’aimerais maintenant présenter quelques arguments qui peuvent
nous permettre de ramener notre opinion sur la sécession à des positions plus
raisonnables et justes. Contrairement à ce que pense une bonne partie des
théoriciens du fédéralisme et de la démocratie, qui voit dans la sécession un
principe en franche opposition avec les principes fédéral et démocratique, la
sécession peut être vue comme un bien conduisant la société démocratique et le
fédéralisme vers un ordre plus juste, plus souvent et davantage négocié,
redonnant ainsi sens à la célèbre formule de Renan (ce n’était pas, bien entendu, le propos de
Renan) sur la remise en question permanente du « vouloir vivre
ensemble ».
Comme le note
Daniel Weinstock, dans les Etats fédéraux ou décentralisés qui connaissent une
certaine forme de pluralisme national à l’intérieur de leurs frontières, on ne
trouve pas le même genre de solidarité et de confiance « naturelles »
que nous trouvons dans un Etat unitaire n’encourageant pas ou très modérément
la création de nouvelles entités administratives ou politiques susceptibles à
leur tour de développer une identité politique propre et concurrente de celle
de l’Etat[xxviii].
Une identité politique forte, ressentie par les citoyens comme leur identité en
tant que peuple différencié, est sans aucun doute un facteur de cohésion, y compris
dans un Etat fédéral (par exemple : Etats-Unis et l’Allemagne), qui met
l’Etat à l’abri des conflits politiques identitaires. Or cette identité
politique forte, ciment de l’unité nationale dans un Etat unitaire (identité
produite et promue par l’Etat), n’est pas une bonne solution là où elle est
rejetée par un ou plusieurs groupes territoriaux. Dans des contextes où le
pluralisme national fait obstacle à un éventuel projet politique unitaire, le
fédéralisme apparaît toujours comme la seule solution ou le dernier arrêt avant
un éventuel terminus « sécession ». Mais Weinstock a raison aussi de rappeler
que le fédéralisme a une logique centrifuge (Beaud parle de logique
« particulariste ») qui tend à émousser des principes démocratiques
importants comme la solidarité et la confiance interterritoriales, rendant
ainsi plus probables et plus fréquents les conflits identitaires entre les
parties fédérées et la fédération[xxix].
Pour éviter que les parties fédérées n’agissent systématiquement de manière
égoïste, ne prenant en compte que leurs seuls intérêts privatifs, il importe de
promouvoir et d’encourager au niveau fédéral une attitude ou un esprit de
loyauté fédérale. Comme d’autres observateurs l’ont montré[xxx],
il importe grandement aussi de faire une place aux parties fédérées dans les
instances décisionnaires de la fédération, afin que la gestion des affaires
communes ne soit pas perçue comme une affaire privative de l’Etat central (ou
du groupe national majoritaire). En effet, plus les décisions prises au niveau
fédéral sont perçues par les parties fédérées comme étant aussi « leurs
décisions », plus elles peuvent se sentir à l’aise dans la maison commune
et, à terme, participer à la création et à la promotion d’une identité
pan-nationale commune. Il en va de même pour les symboles de la fédération
(langues, drapeaux, etc.), qui, s’agissant d’une fédération plurinationale, ne
pourraient refléter une seule identité culturelle et politique sans blesser les
autres composantes.
La sécession
peut-elle être d’une quelconque aide afin de promouvoir cet esprit de loyauté
fédérale nécessaire à la fédération dont parle Weinstock ? Si on veut éviter la
sécession d’une ou plusieurs parties fédérées, l’introduction d’un droit de
sécession clairement défini et dans des conditions bien définies peut être un
moyen d’une efficacité surprenante. Je suis de l’avis de Weinstock lorsqu’il
dit qu’une clause de sécession serait un élément dissuasif ayant un
extraordinaire impact psychologique tant sur les parties fédérées que sur le
gouvernement fédéral[xxxi].
Premièrement, il faut noter que dans des cas comme la Catalogne ou le Québec, le
fait de ne pas pouvoir décider librement de leur adhésion à l’Etat (espagnol et
canadien) est vraiment ce qui pose problème, car leur appartenance à l’Etat est
ressentie comme quelque chose d’imposé. Quitteraient-ils l’Espagne ou le Canada
s’ils pouvaient choisir ? Rien n’est moins sûr. Ce qui est sûr en
revanche, c’est qu’aussi longtemps qu’ils décideraient de rester dans l’Etat
ils ne pourraient plus accuser le groupe national majoritaire d’exercer sur eux
une tutelle illégitime et insultante. La confiance et la loyauté fédérales en
sortiraient grandies des deux côtés, car l’Etat central verrait aussi que,
pouvant choisir l’option « sortie », ils décident néanmoins de
rester, ce qui l’obligerait aussi à nuancer ses critiques à l’égard de la politique
catalane ou québécoise, pour reprendre les exemples cités, trop souvent
injustement accusées d’agir contre la démocratie[xxxii].
En tout cas, aucune des parties ne pourrait plus instrumentaliser le thème de
la sécession : l’épouvantail deviendrait enfin un sujet sérieux, et à
prendre au sérieux[xxxiii].
Mais l’impact
psychologique que le droit de sécession aurait sur le gouvernement fédéral
(Etat central) est tout aussi important. Le gouvernement fédéral aurait aussi
grand intérêt à modifier son attitude arrogante et autoritaire à l’égard des
parties fédérées dans l’hypothèse où un droit de sécession leur serait reconnu.
Si le gouvernement fédéral sait qu’une partie fédérée peut quitter la
fédération ou l’Etat, il y a fort à parier qu’il se montrera plus conciliant et
respectueux à l’égard des demandes des parties fédérées sur des sujets délicats
et importants à leurs yeux. Là aussi, on peut considérer qu’avec le
renforcement de la confiance et de la loyauté fédérales, les parties trouveront
sans doute des raisons de poids pour choisir de rester dans la fédération,
plutôt que de choisir l’option « sortie ».
Je ne pousserai
pas plus avant ma réflexion sur le sujet. Mon but ici était d’avancer quelques
arguments susceptibles de montrer l’intérêt et l’importance que le droit de
sécession (et pas nécessairement pour faire sécession !) peut avoir pour
le fédéralisme. D’ailleurs, l’évolution de l’affaire du Québec est assez
intéressante à ce propos : depuis le célèbre renvoi de la Cour Suprême en
1998, puis la loi de clarification de la sécession en 2000, on n’a pas eu de
poussée de fièvre sécessionniste au Québec, alors que paradoxalement le cadre
juridique et politique pour une éventuelle sécession est aujourd’hui plus ou
moins dessiné (et sans doute plus favorable)[xxxiv].
En conclusion, je
dirais que dans une structure fédérative, le droit de sécession découle de sa
nature contractuelle et peut donc être vu comme un droit fondamental. Si les
fédéralistes souhaitent justement avoir ce droit, c’est pour pouvoir choisir le
fédéralisme librement, mais pas à n’importe quel prix. Dans un Etat
démocratique, fédéral ou non, les valeurs de la démocratie exigent aussi que
l’on écoute la décision d’un peuple ou d’une majorité territoriale manifestant
démocratiquement sa volonté de constituer un Etat séparé ou de revoir les
conditions de son adhésion à l’Etat.
Mais dans tous
les cas, on peut gager que là où les peuples ou territoires, autonomes ou
fédérés, n’ont rien d’important à reprocher au pouvoir fédéral ou central, on
n’aura pas à craindre la sécession. Seuls les Etats dominés par un groupe national
ou un peuple majoritaire, et qui entend le rester à tout prix, ceux qui se
montrent injustes et arrogants envers leurs minorités nationales, ont à
craindre la sécession. Je n’ai jamais cru aux sécessions capricieuses.
Jorge Cagiao y Conde
[i] Cf. Mill, J.
S., Considerations on Representative
Government (1861), in H. B. Acton (ed.), Utilitarianism, Liberty, Representative Government, London, Dent,
1972. Voir
aussi l’article de Nenad Stojanovic dans ce volume.
[ii] Le fait que la
sécession soit considérée par nombre de spécialistes comme étant un élément
contraire aux principes de base du fédéralisme montre à notre sens les
concessions faites par la science juridique et la doctrine dominante en droit
public pour faire rentrer de force le fédéralisme dans le moule de la Théorie
de l’Etat (et de la nation). Or c’est justement cette concession qui pose
problème scientifiquement et peut même être considérée comme contraire aux
principes du fédéralisme. Cf. l’excellent ouvrage d’Olivier Beaud sur la
théorie du fédéralisme (Théorie de la
Fédération, Paris, PUF, 2007).
[iii] Voyenne, B., Histoire de l’idée fédéraliste, t. III,
Paris-Nice, Presses d’Europe, 1981, p. 131-158.
[iv] L’explication
est très claire et pas moins instructive : il nous livre une opinion
(indissolubilité du pacte fédératif) qui n’a aucun lien logique avec sa théorie
contractualiste (les parties qui se fédèrent sont souveraines). Or ce dernier
pas (du contrat entre souverains à la souveraineté une et indivisible du Tout
fédéral), Voyenne le fait non pas à la manière du scientifique (en déduisant
objectivement ce qui doit être déduit de sa thèse initiale), mais plutôt à la
manière du politicien, pour qui le moyen de parvenir à la « vérité »
(entendons ici « connaissance ») importe moins que le fait que la
« vérité » soit conforme à ses propres vues.
[vi] « […] une
fédération authentique ne peut que refuser à notre avis – ce n’était pas celui
de Proudhon, chez qui le pôle libertaire l’emporte toujours – de reconnaître
explicitement un tel droit [de sécession] » (ibid., p. 153).
[vii] Sur la
dialectique proudhonienne, cf. Marc, A., Dialectique
du déchaînement. Fondements philosophiques du fédéralisme, Paris, La
Colombe, 1961.
[viii] Cf. Proudhon,
P.-J., Du Principe fédératif, Tops,
1997, p. 88-90n ; id., De la
capacité politique des classes ouvrières, Paris, Rivière, 1924, p. 198 et
s.
[ix] Sujet tellement
important qu’il a servi de critère à la doctrine en droit public pour établir
le célèbre distinguo « Etat
fédéral » (droit interne) et « Confédération » (droit
international) sur lequel a été bâtie traditionnellement la théorie du
fédéralisme. Cf. Beaud, O., Théorie de la
Fédération, op. cit.
[x] Malaise et
incapacité à penser le fédéralisme qui peuvent être rapprochés du malaise ou de
l’incapacité, conscients ou, le plus souvent, inconscients, que l’on trouve
chez un nombre considérable de penseurs ou de chercheurs ayant écrit sur la
question de la nation ou du nationalisme. Comme le note Wayne Norman, trop
nombreux sont les auteurs en France ou aux Etats-Unis à décrire et souvent à
condamner le nationalisme des « minorités nationales sans Etat » (au
Québec, au Pays Basque, etc.) tout en refusant de voir leur propre culture
politique (celle de l’Etat français ou américain) comme une culture politique
nationaliste (Norman, W., Negotiating
nationalism. Nation-building, Federalism, and Secession in the Multinational State, Oxford University Press, 2006, p. xiii). Attitude qui a,
c’est ce qui nous intéresse ici, des répercussions notables dans la littérature
fédérale spécialisée. L’image proposée par Norman dans l’ouvrage citée est très
pertinente : nombre de théoriciens du fédéralisme ou de chercheurs
feraient en la matière comme le poisson, qui n’est pas conscient de l’eau dans
laquelle il évolue (« Like fish unaware of the water they swim in » -
id.).
[xi] Le droit
international considère que seuls les peuples colonisés ou opprimés ont un
droit à l’autodétermination (extérieure) et donc à former un Etat indépendant.
Les autres « peuples » (la définition du mot pose aussi problème) ont
seulement droit à une autodétermination « intérieure », c’est-à-dire
dans le cadre juridique et territorial de l’Etat qui les contient. On voit à
quel point cette conception peut être problématique : un
« peuple » ne bénéficiant que d’une autonomie qu’il (entendons :
la majorité qui le gouverne) peut juger très restreinte ou en tout cas pas
satisfaisante, peut-il vraiment être considéré comme pouvant s’autodéterminer
dans le cadre de l’Etat démocratique qui le contient ? Sur la théorie de
la juste cause, cf. Buchanan, A., Secession. The morality of Political Divorce from Fort Sumter to
Lithuania and Quebec, Boulder, San
Francisco, Oxford, Westview Press, 1991 ; Norman, W., « The Ethics of Secession
as the Regulation of Secessionist Politics », in Moore, M. (ed.), National Self-Determination and Secession,
Oxford University Press, 1998, p. 34-62. Pour une discussion des théories de la
sécession, cf. Lehning, P. B. (ed.), Theories
of Secession, London and New York, Routledge, 1998 ; Norman, W., op. cit.
[xiii] C’est la thèse
dominante dans les études sur le fédéralisme, avec des nuances plus ou moins
importantes chez certains auteurs. Voir par exemple un classique du
genre : Wheare, K., Federal
Governement, Oxford University Press, 1947. Le lecteur pourra aussi lire un texte récent soutenant la même
thèse (avec une information très actualisée) et accessible en ligne :
Harbo, F., « Secession Right – an Anti-Federal Principle ? Comparative Study of Federal States and the UE »,
Journal of Politics and Law, 3/2008 (http://www.ccsenet.org/journal/index.php/jpl/article/viewFile/727/698).
[xiv] Cf. par exemple
Kelsen, H., « La théorie juridique de la convention » (1940), in
Leben, C. (éd.), Hans Kelsen. Ecrits
français de droit international, Paris, PUF, 2001, p. 85-120.
[xvii] Sur la notion
de contrat fédératif et les différences entre lien contractuel et lien
statutaire dans le fédéralisme, cf. Beaud, O., « La notion de pacte
fédératif. Contribution à une théorie constitutionnelle de la
Fédération », in Mohnhaupt, H., Kervégan, J.-F., Liberté sociale et contrat dans l’histoire du droit et de la
philosophie, Klostermann, 1997, p. 197-270.
[xviii] Aux XVIII
et XIX siècles, dans un temps historique que nous pouvons
définir, avec Hans Kelsen (Théorie pure
du droit, Bruylant-L.G.D.J., 1999, p. 311 et s.), comme ayant et
connaissant un droit interétatique (surtout) et intra-étatique
« primitif » (c’est essentiellement par la guerre et la conquête
qu’on règle alors les différends entre peuples ou Etats), Montesquieu, Rousseau
et bien d’autres pouvaient expliquer, de manière très pertinente, que les
petites Républiques pouvaient souhaiter perdre leur souveraineté au profit de
la fédération afin de se protéger d’une menace extérieure et de garantir ainsi
leur existence. Cet argument, hier valable, ne semble pas avoir aujourd’hui, au
XXIe siècle, avec le développement du droit international et de
l’Etat de droit, la même force ni la même pertinence pour expliquer la
« perte volontaire » de la souveraineté des groupes qui décident d’entrer
dans une structure fédérative. L’UE en est encore un excellent exemple.
[xx] Logique qui,
d’une certaine façon, précéderait aussi le pacte. Sur cette question, cf. Máiz, R., « Federalismo plurinacional: una teoría política
normativa », Revista d'Estudis Autonomics
i federals, Barcelona, 2006 (3), p. 57-58 ; id., La frontera interior. El lugar de la nación en la teoría de la
democracia y el federalismo, Murcia, Tres Fronteras Ediciones, 2008.
[xxi] Ou
inconditionnellement. Même une volonté de faire sécession considérée comme
injuste, illégale ou illégitime par l’Etat qui subirait la sécession reste une
volonté politique, exprimée démocratiquement, qui doit être écoutée. Si elle
n’est pas conforme à la légalité constitutionnelle, elle pourra être considérée
comme révolutionnaire ou illégale, mais sa légitimité, dès lors que la
sécession est souhaitée par une majorité claire, semble difficilement
discutable. Il suit de là que, en dernière instance, la décision de faire
sécession peut être, de facto,
inconditionnelle.
[xxii] Renvoi relatif à la
sécession du Québec, [1998] 2 R.C.S. 217. Cela ne veut pas dire,
conformément à l’explication donnée par la Cour, que cette interprétation est
la seule possible et valable, ni d’ailleurs que l’on puisse en déduire un droit
absolu qui pourrait être opposé aux autres principes fondamentaux cités par la
Cour, et avec lesquels le principe du fédéralisme devrait nécessairement composer
(la Cour cite, outre le fédéralisme, la démocratie, la primauté du droit, le
constitutionalisme et le respect des minorités) ; cela veut donc
simplement dire que cette interprétation est possible et légitime, et, c’est
cela qui nous intéresse ici, elle découle des principes du fédéralisme.
[xxiii] Une loi dite de
« clarification », sur la clarté référendaire, prévoyant les
modalités dans l’exercice du droit de sécession, a été votée par le législateur
canadien en 2000, à la suite de l’avis précité de la Cour Suprême.
[xxiv] L’expression
est empruntée à Beaud : « le principe fédéral n’est pas un principe
individualiste, mais bien plutôt son contraire : c’est un principe
« holiste » » (Théorie de
la Fédération, op. cit., p. 198). Il convient d’attirer aussi l’attention
du lecteur sur le caractère trompeur de l’expression
« individualiste », car à dire vrai toutes les théories de l’Etat qui
s’inspirent des théories du contrat social (entre individus souverains)
aboutissent à une forme d’holisme par en haut (un peuple un et indivisible, le
mythe des origines communes, etc.). Il conviendrait donc d’opposer plutôt un
holisme par en bas (ou fédéralisme par en bas) à un holisme par en haut
(fédéralisme par en haut).
[xxv] Seuls les Etats
d’Ethiopie et de Saint Christophe et Niévès ont à ce jour inclus une
clause de sécession dans leur Constitution.
[xxvi] Pour une théorie libérale de la sécession, cf. Beran,
H., « A Liberal Theory of Secession », Political Studies, 32/2, 1984, p. 21-31 ; id., « A
democratic theory of political self-determination for a new world order », in
Lehning, P. B. (ed), op. cit., p.
32-59.
[xxvii] Question, ne
l’oublions pas, qui porte sur le sens et sur l’éventuelle identité du
« peuple qui choisit ». Autrement dit, qui peut être considéré comme
étant un peuple, capable donc de décider de son avenir ? Je ne peux pas
traiter ici une question aussi complexe, mais il convient de pointer du doigt
plusieurs lieux communs qui sont souvent avancés pour écarter le droit de
sécession des minorités nationales : 1/ l’argument par l’absurde,
consistant à dire que le fait d’accorder le droit de sécession à toute majorité
territoriale aussi restreinte soit-elle, légitimerait aussi la sécession d’un
quartier ou d’un pâté de maisons, est puéril : il semble plutôt cacher une
volonté de préserver le statu quo des
Etats-nation souverains ; 2/ le droit international, produit par les
Etats-nation (ou Etats-peuple), et le droit public interne sur la question ne
peuvent pas être pris avec un minimum de sérieux comme étant un étalon de
mesure fiable et impartial en la matière car ils tranchent en vérité une
question dans laquelle ils (les Etats et leurs Hautes Cours de Justice) sont
clairement juges et parties : ils jugent du statut ou de la condition de
« peuple » ou de « nation » (voir la récente décision du
Tribunal constitutionnel espagnol sur le cas de la Catalogne) concernant des
territoires qui se trouvent ou peuvent se trouver à l’intérieur de leurs
frontières. Comme le dit Rainer Bauböck « it is impossible to
find a rule for democratic decisions about bouandaries that would be
procedurally neutral between the preferences of secessionists and
unionists » (« Why stay together ? A pluralist approach to
secession and federation », in Kymlicka, W., Norman, W. (ed.), Citizenship in diverse societies, Oxford
University Press, 2000, p. 367). La décision du Conseil constitutionnel
français portant sur l’inconstitutionnalité de l’expression
« peuple » pour se référer au peuple corse est un autre très bon
exemple (Décision n° 91-290 DC du 9 mai 1991 – loi portant statut de la
collectivité territoriale corse).
[xxviii] Weinstock, D.,
« Vers une théorie normative du fédéralisme », Revue internationale des sciences sociales, n° 167, mars 2001, p. 82.
[xxx] Par
exemple : Requejo, F., « Fédéralisme et groupes nationaux », Revue internationale des sciences sociales,
n° 167, mars 2001, p. 43-51 ; Fossas, E., Requejo, F. (dir.), Asimetría federal y Estado plurinacional. El debate sobre la
acomodación de la diversidad en Canadá, Bélgica y España, Madrid, Trotta, 1999.
[xxxii] Les mouvements
nationalistes sous-étatiques sont souvent vus et présentés par l’Etat (par ses
responsables politiques, ses intellectuels, etc.) comme
« nationalistes », mot qui prend une connotation péjorative et laisse
à entendre qu’il n’y aurait qu’un seul nationalisme (qu’ils présentent comme
étant néfaste en démocratie) : le nationalisme sous-étatique. C’est un
procédé par lequel on essaie de renvoyer le négatif dans le camp rival et faire
croire qu’il n’y a pas de « nationalisme » d’Etat. Les études spécialisées
ont pourtant montré depuis une bonne dizaine années que tous les Etats ont
pratiqué et pratiquent un « nationalisme » qu’on pourrait dire
décomplexé, et que ce « nationalisme » n’est pas moins
« nationaliste » que le nationalisme des nationalismes
sous-étatiques. L’utilisation du terme « nationaliste », pour se
référer aux seuls nationalismes sous-étatiques, en leur prêtant
systématiquement des intentions anti-démocratiques, est scientifiquement non
fondée. Cette utilisation, telle que décrite, est donc clairement
idéologique.
[xxxiii] Si aucune
procédure légale ne prévoit la sécession, il peut en effet être politiquement
rentable d’agiter l’épouvantail séparatiste chaque fois qu’une élection
approche, ou d’accuser le pouvoir central d’imposer une tutelle perçue comme
illégitime car on sait que les menaces ne seront pas suivies d’une éventuelle
consultation populaire (illégale ou juridiquement non contraignante), qui
pourrait pourtant, rappelons-le, désavouer les dirigeants nationalistes à
l’origine de la consultation en cas d’échec. Un tel désaveu serait très
difficile à gérer et aurait sans doute des conséquences pour le/les parti(s)
ayant appelé le peuple consulté à s’exprimer en faveur de la sécession. En
revanche, si la sécession est prévue et peut aboutir conformément à la légalité
constitutionnelle, on hésitera beaucoup à jouer la carte de la sécession en
raison des conséquences que pourrait avoir un résultat négatif. On peut même
imaginer que seul un gouvernement sûr d’avoir un soutien massif se risquerait dans
ce cas à consulter le peuple.
[xxxiv] Plusieurs
responsables politiques canadiens semblent désormais prêts à reconnaître que la
sécession du Québec serait acceptée par le gouvernement canadien si elle devait
se produire. Le même phénomène ou la même attitude, semble-t-il, commence à
être perceptible parmi la classe politique au Royaume Uni à propos d’une
éventuelle sécession de l’Ecosse.
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